Entre le corps et l'esprit: les Larmes

Colloque organisé par Florence Dumora (3LAM, Le Mans Université), Cécile Bertin-Elisabeth (EHIC, Université de Limoges) et Christine Orobitg (TELEMMe Aix Marseille Université)

« Les paroles, que sont-elles ? Une larme en dira plus », écrivait Franz Schubert. S’il est d’usage de considérer que les larmes sont une expression proprement humaine, leurs significations et leurs enjeux dépendent de la part attribuée à l’affectivité ou à l’intellect, entre approche cynique et stoïcienne notamment. Baltasar Gracián dans L’honnête homme nous invite à dépasser l’apparente dichotomie de deux modèles topiques : « on ne doit pas toujours rire avec Héraclite ni toujours pleurer avec Démocrite ».

À la différence du rire qui fuse de façon impalpable, les larmes qui s’écoulent sont concrètes. Elles ont de surcroît la transparence de l’eau et la forme de perles. Picasso choisira d’ailleurs de représenter des yeux en forme de larmes. Les larmes qui s’écoulent parlent un langage que d’aucuns interprètent différemment selon les époques et les codes sociétaux. Roland Barthes invite à questionner la puissance originelle des larmes, ce « milieu liquide de l’expansion cordiale dont on sait qu’elle n’est rien d’autre que la véritable force génitrice ». En effet, de quel secret –force ou faiblesse— ce signe visible est-il le révélateur ? Quelle est la part du corps, de l’esprit et de la culture dans les pleurs ? Car les larmes, comme l’écrit Jean Loup Charvet, sont chargées d’« une éloquence où les yeux se font bouche ».

Le paradoxe de la larme, révélatrice à la fois de l’intime et de conventions sociales, mérite d’être questionné.

La première session de ce colloque regroupera une vingtaine d’intervenants qui donneront un éclairage sur l’Antiquité, la linguistique, le Moyen-Âge et la première modernité.

Les interventions :

C.-L. Raschel, « Pleurer dans le Désert : les scènes de larmes dans l’hagiographie monastique égyptienne »

J. Minas, « Sénèque et la consolation : la quête des larmes justes»

 E . Tola, « Les larmes de Byblis (Ovide, Mét. 9, 450-665) ou les paradoxes physiques et textuels d’un désir interdit »

 M. Beaubert, « Lacrimae sancti. Pleurs et gémissements dans les Enarrationes in Psalmos de Saint Augustin»

L. Trovato, « ʺLes larmes sont le langage muet de la douleurʺ(Voltaire). Traitement et caractéristiques de l’entrée « larme » dans les dictionnaires d’hier et aujourd’hui ».

G. Porterie, « Les larmes héroïques dans les épopées chrétiennes latines de l’Antiquité tardive »

A.-G. Cuif, « Douceur ou miracle des larmes dans l’Ancien et le Nouveau Testament »

C. Iglesias, «“Cansados ojos míos, ayudadme a llorar el mal que siento”. Y a-t-il un langage féminin des larmes dans la poésie lyrique espagnole au Siècle d’or ?»

A. Urbaniak, Lágrimas del enamorado en el Dolce stil novo en el cruce de la literatura y la medicina.

A. Lamy, « Les larmes dans la philosophie et la littérature du xiiie siècle, chez Thomas d’Aquin, Jean de Meung et Hadewijch d’Anvers »

S. Perez, « C’est d’avoir pleuré » (Louis XIII) : physiopolitique des larmes dans la famille royale (France, 17e siècle)

J. Morice, Le secret des larmes chez Cureau de la Chambre : médecine et philosophie morale

N. Godnair,  « “Et la larme vous vient à l’oeil, de tristesse et de compassion” : L’apparition des larmes comme réaction esthétique à l’automne de la Renaissance (1570-1620) »

Ch. Marguet, « Les larmes masculines dans le roman baroque espagnol »

P. Almeida Mendes, « Modèles larmoyants au Portugal à l’époque moderne: textes et contextes »

E. Garbay Velázquez, «Las lágrimas místicas: la función del llanto en la oración del recogimiento»

J. Brichet, « Mit Thränen soll mein Aug mir meinen Khiel befeuchten» : larmes et rhétorique de la sincérité dans la littérature spirituelle en langue allemande du XVIIe siècle. »

G. Sambras, « De l’usage des larmes dans la poésie profane et religieuse dans l’Angleterre de la première modernité »

I. Tremblay, « Larmes et consolation dans le roman sentimental des Lumières »

A. Souchet, « Clarissa, or, The History of a young Lady (1748): la force des larmes»

H. Queiros, «Les larmes des religieuses entre abondance et retenue : de l’analyse lexicographique à l’évolution anthropologique»

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